I don't know why i'm here

Mais qu'est-ce que je fichais ici ? La réponse était pourtant simple toutefois la question me taraudait l'esprit depuis plus de quinze minutes. Mais où étaient-elles ? J'avais relu ce texto une bonne dizaine de fois ; j'étais certaine d'être au bon endroit. Avaient-elles osées me faire une blague ? Ce n'était pourtant pas leur genre et ça ne semblait pas non plus être un coup monté. Mes textos restaient sans réponse. Un problème de batterie ? Du trafic sur les routes ? C'était franchement pas le moment. Il faisait nuit noir et si je n'étais pas vraiment peureuse au point d'éviter les bois en pleine nuit, je n'étais toute de même pas trop à mon aise. Est-ce qu'elles avaient commencé l'activité sans moi ? Étais-je arrivée la première ? Pour le savoir, il n'y avait qu'une solution : demander aux organisateurs s'ils n'avaient pas aperçue trois écervelées leur emprunter du matos et s'enfoncer dans les bois sans moi. Je vous jure que si elles avaient osées commencer sans moi, j'allais leur passer un savon de type boudin silencieux. J'aimais pas être mise en plan, surtout lorsque on modifiais mes projets pour ce genre de chose sans vraiment me laisser le choix. Je les adorais ces crétines mais il y avait des limites. A tâtons, j'approchais du petit stand isolé pour formuler mon unique question du soir. J’espérais bien que quelqu'un éclairais ainsi la situation. « Excusez-moi, est-ce que vous auriez vu trois filles dans la vingtaine dans le coin ? Récemment. Peut-être max il y a une demie heure ? » « C'est possible. Vous croyez que j'établis un portrait robots de tous les personnes qui s'arrêtent à notre stand ? » Super aimable le bonhomme. Je fronçais les sourcils, perplexe et légèrement insulté par le ton du monsieur. Je soupirais sans ménagement, tendant mon bras devant lui. « Un bocal et une épuisette. » Il n'avait pas été poli, je ne vois pas pourquoi je le serai maintenant. En attendant, j'allais devoir chercher par moi-même. Connerie !

Le matériel entre les mains et après une ultime grimace, je pris la direction du bois. Je croisais mentalement les doigts pour que les filles ne tardent plus trop même si je n'y croyais plus vraiment. J'envoyais par ailleurs un dernier texto à l'attention de l'organisatrice de cette soirée infernale pour l'avertir que j'avais commencé. Enfin... commencer était un bien grand mot puisque outre faire trois pas, je n'avais présentement encore rien fait. Le texto ainsi envoyé, je passais mon portable en mode lampe de poche afin de me guider plus facilement à l'intérieur du bois. J'avançais ainsi avec la lumière pour guide jusqu'à arrivé non loin d'un lac. Au dessus de ce dernier virevoltaient un tas de point lumineux. Aucune trace des filles cela dit mais maintenant que j'étais arrivée là, hors de question pour ne pas jouer le jeu de plus, ces lucioles avaient subitement quelque chose de totalement attractif. C'était comme si je devais les attraper. Il me les fallait. J'éteignais alors mon portable pour mieux l'enfuir dans la poche de mon petit short en jeans et c'est avec la plus grande des précautions que je tendais le bras et l'épuisette par dessus le point d'eau. S'il y avait bien une chose à éviter, c'était bien de ne pas tomber dedans. J'avais eu ma dose d'éclaboussure avec le parcours aquatique et la bataille. J'avais assez donné et puis, je tenais à la préservation de mes effets personnels. Bras tendu, j'osais un léger mouvement vers la gauche ; tentative de capture qui marqua le début de ma chasse. Je venais tout juste d'attraper mes trois premières et merveilleuses lucioles. Elles étaient si belles, si vulnérables. Sans plus attendre je les transvasais dans le bocal, fin prête à m'y remettre.

Si je me fiais à la réglementation de l'activité ; pour prétendre à la victoire, il fallait un total de cinq lucioles par personnes. J'avais déjà dépassé la moitié du chiffre en une tentative. Est-ce que j'étais particulièrement douée pour chasser des insectes ou alors étais-ce seulement de la chance ? Il n'y avait qu'en réessayant que je serai fixée. Pourtant, je ne pouvais m'empêcher d'avoir un petit pincement au cœur en observant ces pauvres petites choses enfermés dans mon bocal de verre. Je n'aimerai vraiment pas être à leur place. Autant en finir et vite non ? Elles avaient beau être magnifiques à regarder, j'avais toujours un cœur et une sensibilité un peu trop relou pour le coup. Plus vite j'attrapais les deux dernières, plus vite je pourrais retrouver ma chambre et mon ordinateur. J'avais des choses à préparer pour mes viewers, j'avais un tas de nouveaux projets que je voulais essayer. Je perdais presque du temps là. Surtout qu'elles ne viennent pas me reprocher de ne pas être venue... Aussitôt, je tendais mon épuisette vers l'avant. Une dernière et unique fois. Un magnifique revers et hop, trois nouvelles créatures captures. Décidément, je battais tous les recors ! Enthousiaste, je me reculais avec prudent du bord du lac et transférait mes dernières proie à l'intérieur de leur prison de verre. Sans plus tarder, je sortais mon portable pour immortaliser ce moment d'une petite photo. Elle me servirait de preuve si on me reprochait quoi que ce soit, en plus de préserver ce petit souvenir quelque part. Une fois fait, je rebroussais chemin pour rendre son équipement au vieux mec aigris et relâchais sans plus attendre les jolies lucioles dans la nature. Pire qu'un GPS, elles repartirent sans demander leur reste vers les bois. Magnifique. J'osais imaginer combien ça devait être impressionnant lorsqu'on en relâchait une vingtaine ensemble. Peut-être l'an prochain. En attendant, je rentrais chez moi avec le sourire. Frustrée mais souriante.